DGH, le retour! Trois maudites lettres pour symboliser l'effet d'une politique de privation appliquée à l'Ecole Publique, et une croisade qui n'en finit pas ! Le crû 2009 de la Dotation Horaire Globale des établissements (en nombre d’heures) n'est pas meilleur que celui de 2008. Pour certains établissements, il est même pire ! Et demain, à nouveau, parents et enseignants viendront crier leur colère sur le tarmac de Parly II, sous les fenêtres de l'Inspection Académique, au cours d'un rituel dont ils se passeraient bien.
Après avoir été copieusement rincés l’an dernier (rappelons que nous avons rendu des centaines de postes à effectifs d’élèves quasi constants l’année dernière dans les Yvelines), nous pensions – pauvres parents naïfs de l'enseignement public – pouvoir connaître une pause cette année, pensant qu’il n’était pas possible de comprimer davantage nos classes ?! Que nenni ! Cette année, mesdames, messieurs, l’IA des Yvelines recommence son sport d’hiver favori : l’attribution de DGH à la hache ! (oui, ça rime..)
Pourtant, l’effet de la DGH 2008, nos enfants le vivent quotidiennement.
Pour vous en convaincre relisez l’historique des attributions DGH sur nos 3 collèges de la ville(Les Prés, Giacometti, La Couldre). Les exemples de « compactage » sont nombreux : le niveau 5ème du collège Les Prés par exemple a vu un effectif moyen supérieur à 30 élèves/classe cette année. Au niveau national, le secondaire, et les collèges en particulier, avaient payé le prix fort des 11200 suppressions de postes de l’Education Nationale de la rentrée 2008. Pour 2009, le Ministre avait promis que la cuvée des 13500 suppressions de postes se ferait sans douleur, sur des « postes d’enseignants qui ne sont pas devant les élèves » (sans doute il comptait sur les RASED pour parvenir à cette nouvelle performance). C’était une promesse de coupe sans douleur (et sans précédent) pour endormir la population et les députés-sénateurs qui sont prêts à voter tout ce qui permet de diminuer le coût de la fonction publique… quelles qu'en soient les conséquences.
Et bien le crû 2009 va frapper encore plus fort dans le secondaire, dans certains lycées et collèges des Yvelines, contrairement aux belles paroles du Ministre, et du président de la République lui-même, qui affirmait à Saint-Lô, pour calmer la colère des lycéens, que la rentrée 2009 se ferait avec le même nombre de profs devant les élèves au lycée. Mensonges ! Des exemples tout près de chez vous ? Reprenons nos petits 5ème du collège Les Prés : l’an prochain ils passent en 4ème, mais sans avoir le droit à une création de division supplémentaire de 4ème, alors qu’il y a toujours des arrivants au niveau 4ème dans tous les collèges à cause des classes européennes qui attirent des inscriptions de l’extérieur. Ils vont donc rester à 31/classe pour satisfaire l’appétit de l’IA en postes ! Une génération sacrifiée, et maudite, car elle a eu la malchance d’être mal servie par la DGH 2008, péché originel qui la suivra d’année en année au nom de la guerre des postes à supprimer. C’est tout simplement une honte ! Autre exemple, le lycée Emilie de Breteuil, qui voit cette année sa DGH amputée de 150 h pour une baisse (non fondée) de 59 élèves. C'est-à-dire un taux supérieur à 2,5 heures de DGH/élève (H/E). Alors que le taux moyen H/E est de l’ordre de 1,15-1,20 en collège et en moyenne de 1,66 en lycée (lycées genéraux et professionnels confondus). Comment arrive-t-on à ce tour de force ? Le recteur demande purement et simplement la fermeture de 4 classes (une division de seconde, une de première, et deux de technique) ! Encore un bel exemple de compactage. Les Yvelines veulent sans doute gagner une médaille dans la compétition aux meilleures suppressions de postes.
Le rituel annuel des délégations qui viennent réclamer les heures qui manquent s’est installé durablement.
Avant 2008, nous connaissions déjà une érosion annuelle des postes, à un rythme moyen d’environ 4 à 5000 par an, depuis exactement 2003 (ne cherchez pas de coïncidence de calendrier...). Mais en 2008, il y a eu un changement radical dans l’organisation du travail rectoral sur l’attribution des heures de DGH. Avant, c’était les chefs d’établissements, principaux de collèges et proviseurs de lycées, qui faisaient remonter leurs prévisions d’effectifs pour l’année suivante, à cette période de l’année. Pour cela, ils se basaient, les uns sur les effectifs montant des CM2, les autres sur les passages de 3ème à 2nde dans les collèges de secteur, à l’époque où il y avait encore application de la sectorisation, et ils se basaient aussi sur l’historique de l’établissement en taux de redoublements, et arrivées extérieures. Et bien cette période de « responsabilisation » des chefs d’établissements est maintenant révolue !
La nouvelle méthode de calcul des DGH par le rectorat: une technique d’attribution par « défaut »
Depuis 2008, c’est l’IA (au niveau collèges) et le rectorat (lycées) qui décident de l’enveloppe AVANT les retours des chefs d’établissement, sur la base de savants calculs inconnus du vulgum pecus. Peut-être disposent-ils d’une cellule spéciale capable de leur calculer à l’élève près la structure l’an prochain de chaque établissement du département ? Non, bien sûr que non ! C’est plus simple que ça.
La calculette de l’IA est en fait plus prosaïque ; elle dispose de deux touches majeures : la touche soustractive « - » et la touche de pourcentage % . La technique de calcul est imparable et efficace : pour donner systématiquement moins de DGH (= suppressions de postes), il suffit d’attribuer une prévision d’effectifs pessimistes systématique (moins d’élèves qu’attendus). En gros, appliquer 10 à 15% de moins pour tout le monde. Par exemple un collège de 400 se voit attribué au premier tour 360 élèves (-10%) même si c’est complètement faux. Puis il suffit d’attendre, voir ce qui sort, et mesurer les réactions. Ce n’est pas cher, et ça peut rapporter gros en postes. Cette technique du coup de marteau sur les budgets est d’ailleurs bien connue dans le privé, elle est destinée à mesurer réactivité et combattivité des troupes. Les plus volontaires monteront au créneau pour réclamer ce qui leur est dû, et obtiendront en gros le strict nécessaire dans les rattrapages de juin (en général très en deçà de ce qu’ils pouvaient espérer pour mener à bien des projets d’établissements), les autres resteront assommés, voire perdront des élèves qu’il ne sera plus possible d’inscrire dans une structure de DGH trop contrainte. Au bout du compte, on resserre très efficacement le nombre de postes. Et on affaiblit les collèges et lycées déjà fragilisés par la fin de la carte scolaire, et qui comptent peu de représentation syndicale (comme souvent dans l’enseignement technique) ou de représentants de parents (FCPE bien sûr, les autres se sentent rarement concernés si ça ne touche pas la classe de leur enfant..).
On pouvait légitimement espérer que cet exercice « vérité sur les effectifs » imposé aux chefs d’établissements, n’était valable qu’un an, et qu'une fois cette cartouche grillée, une "pause" dans la contraction devait suivre les années suivantes, le temps de digérer. Et bien, pas du tout ! C’était sans compter la dérégulation massive de la carte scolaire et la feuille de route du Ministre qui impose désormais à chaque rentrée un quota très élevé de suppressions de postes. On ne peut pas bien sûr supprimer les élèves, mais d'autres astuces existent: on peut toujours proposer de les réorienter pour « minimiser les coûts » DGH. Par exemple, un élève dans le technique coûte plus cher en nombres de postes qu’un élève en filière générale. De même un élève redoublant coûte cher en postes, il vaut mieux le faire passer, etc. etc.… A l’arrivée, il y a moins de liberté pédagogique, moins de notion de projet d’établissement, encore moins de notion d’orientation « libre » et de respect des choix de l’élève. Il n’y a que de la contrainte ! Tenir à tout prix dans sa DGH, voilà l’exercice annuel et obsessionnel des établissements de l’enseignement public depuis quelques années, et particulièrement depuis 2 ans dans les Yvelines.
Le nouveau mur des lamentations dans les Yvelines se trouve sur le parking de Parly II pour le cortège des délégations reçues à la queue leu leu par l’IA au Chesnay :
Alors pour la 2e année consécutive, nous allons assister (demain, voir article suivant) au long cortège des délégations d’enseignants et de parents en colère. Ceux-ci sont désormais habitués à bloquer une demi-journée en février pour cet exercice lamentable de la protestation attendue (et entendue) qui devient une tradition yvelinoise (l’an dernier c’était le 15 février). Pourquoi ce gaspillage d’énergie et de temps consacré à se battre pour sauvegarder les moyens légitimes de nos enfants de collège et de lycée ? Demandez-le à l’IA demain, il se prête à l’exercice avec gourmandise. Sa réponse immuable, nous la connaissons déjà : « j’ai donné les moyens suffisants au collège XXX, et nous verrons en juin si des ajustements sont nécessaires ». L’année dernière, nous avions mobilisés nos élus locaux autour de ces DGH notoirement insuffisantes. Pour le collège Les Prés il avait osé affirmer en février qu’il avait donné « plus que nécessaire » au collège Les Prés. En juin, il a été obligé de lui rendre des dizaines d’heures, et de rouvrir une classe, devant l’évidence des effectifs. Allons-nous accepter ce jeu récurrent et destructeur encore longtemps ?
Et bien nous en avons tout simplement ras-le-bol de ce rituel ! Ras-le-bol parce qu’on se fout de nous ! Et de nos enfants, que nous avons choisis de mettre dans l’enseignement public.
Demain, à 14h, il y aura donc à nouveau rassemblement devant l’Inspection Académique au Chesnay. Parents et les enseignants s’y retrouveront pour dénoncer l'injustice.
Cette tribune, je l’adresse à tous les sceptiques qui pensent que nous exagérons, qui fustigent les manifestations, et qui ne vont pas manquer de dire: « jamais contents ». Demain, ce n’est pas une manif pour la forme, c’est une manif pour lutter contre l’asphyxie bien réelle de nos collèges et lycées. Celle du 15 février 2008 était spontanée, et traduisait une vraie colère. La colère n’est pas retombée en 2009, loin s’en faut.
Comme un dessin vaut mieux qu’un long discours, vous trouverez ci-après l’évolution de la DGH d’un lycée public (Emilie de Breteuil) depuis 2002.
Est-ce que quelqu’un peut me dire combien de postes le collège et le lycée privés Saint-François d’Assise) Montigny ont rendus depuis 2 ans ou depuis 2002 ?? On n’ose même plus le demander, dans un département certainement l’un des plus conservateurs de France, où les pouvoirs publics ont choisi depuis longtemps leur camp, celui des établissements d’élite, et de l’enseignement privé.
François ANDRE, président de la FCPE Montigny
Au fait, la DGH (ou DHG) qu'est-ce que c'est??
GLOSSAIRE du parent de base:
La DGH ou DHG (dotation horaire globale) correspond à un budget d'heures par établissement avec lequel le chef d'établissement crée des classes et doit s'assurer du nombre d'heures par matière et par classe en fonction des filières et options choisies par les élèves).
Le ratio H/E correspond au taux entre le total des heures d'enseignement et le nombre d'élèves.
Axiome de base: Si le H/E baisse, cela signifie soit que les élèves ont moins d'heures de cours (les heures minimales par matière ne sont pas strictement respectées), soit les élèves sont davantage "tassés" dans les classes.
Corollaire : La stratégie de destruction avancée de la DGH en février avec une baisse infondée et artificielle des effectifs conduit à voter une répartition de DGH où des postes sont supprimés, sans pouvoir être rétablis en juin par du rattrapage d'heures de DGH. Cela a pour conséquence d'avoir des enseignants qui doivent soit accepter des heures supplémentaires pour remplacer leurs collègues dont les postes ont été supprimés, soit accepter d'occuper des postes provisoires remis en cause chaque année ce qui nuit à l'élaboration de projets d'établissement. Cela pourrit l'ambiance dans les établissements comme dans le cas de plans sociaux en entreprises.
Qui paie au bout de la chaîne? Vos enfants.