Penser régler les problèmes de l'école en réservant l'accès à des Bac+5 est une erreur grossière qui sera lourde de conséquence !
- Les difficultés rencontrées dans les écoles n'ont rien à voir avec les connaissances... Ceux qui regrettent l'école d'antan, qui pensent qu'elles sont devenues des "fabriques de crétins" devraient se souvenir de leur instituteur qui, ayant passé son concours d'Ecole Normale en troisième, ne s'en sortait finalement pas si mal !
- Les futurs professeurs d'écoles ne seront plus issus des couches populaires (Bac +5 !) et seront déconnectés de la réalité sociale : ambiance assurée en Zep !... mais il est vrai, que d'ici là, les Zep, seront reléguées au Musée de Paléontologie Pédagogique.
- Les loups hurlent déjà en déplorant que des Bac+3 soient payés à surveiller la sieste en maternelle... Que diront-ils avec des Master 2 ? Les maternelles rejoindront, alors, le même musée.
Le ministre aurait intérêt à voir "Entre les murs". Il apprendrait que le métier ce n'est pas juste transmettre des connaissances. C'est aussi savoir gérer la diversité des personnes. Et ça nécessite du professionnalisme". Pour Jean-Louis Auduc, directeur adjoint de l'IUFM de Créteil, le projet de réforme de la formation des enseignants envisagé par Xavier Darcos est une erreur.
C'est Le Monde qui a rendu public le 28 mai cette nouvelle réforme. Selon le quotidien, les enseignants seraient recrutés dès 2010 au niveau du master, le concours étant maintenu mais réservé aux titulaires du master 2 (bac +5). Selon Luc Cédelle, "les universités pourraient intégrer à leurs masters disciplinaires des modules de préparation à l'enseignement". Au lendemain du concours, les candidats reçus seraient directement envoyés en classe à temps complet. La seconde année serait supprimée. Tout au plus le nouvel enseignant pourrait-il être suivi par un conseiller pédagogique.
Une formation sacrifiée
Le plan de formation des enseignants dévoilé par Le Monde, s'il s'avérait confirmé, serait un mauvais coup porté à l'Ecole et particulièrement à l'enseignement des couches populaires.
Il faut d'abord marquer qu'il isolerait encore davantage la France en Europe. La formation strictement professionnelle (non disciplinaire) occupe généralement chez nos voisins environ la moitié du temps de formation. C'est le cas par exemple en Finlande (50%). La France se singularise déjà avec la formation professionnelle la plus faible d'Europe (13%). Sa quasi-suppression au profit d'un allongement de la formation universitaire achèverait de nous singulariser. C'est dire que la remise en question de cette formation professionnelle ne se pose qu'en France. Partout ailleurs on cherche à professionnaliser davantage la formation et à ne pas la séparer de la formation théorique.
Ce mouvement général ne résulte pas du hasard. Il est lié à la démocratisation scolaire et à l'arrivée dans les établissements d'élèves éloignés de la culture scolaire traditionnelle. C'est parce que l'Ecole s'adresse à tous qu'elle a besoin de maîtres capables de se faire comprendre d'enfants très différents des bons élèves d'autrefois, des enseignants d'aujourd'hui.
L'arrivée dans les établissements populaires des nouveaux maîtres frais émoulus des universités mais désarmés face aux difficultés du métier en zep, ne pourra que créer des difficultés supplémentaires à ces établissements. La faiblesse de la formation des enseignants se retournera davantage contre les enfants des quartiers populaires que contre ceux des familles favorisées, mieux adaptés à l'Ecole et scolarisés dans des établissements à faible turn over.
Réactionnaire sur le terrain pédagogique, la réforme projetée de la formation des maîtres serait aussi l'enterrement du droit à l'éducation pour tous.